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GÉNE ET ADN

 

 

 

 

 

 

 

Un gène n'est-il qu'un simple segment d'ADN ?
Ting Wu et Jim Morris dans mensuel 348


daté décembre 2001 -  Réservé aux abonnés du site
Comme tous les termes scientifiques, « gène », « génétique » et « épigénétique » ont une histoire, trop souvent méconnue par les acteurs contemporains. Pour en dérouler le récit, deux généticiens se livrent à un exercice original de science et de fiction : un correspondant de 1910 les met au défi d'expliquer pourquoi la signification de ces mots a tant dérivé au cours du XXe siècle !
Messieurs,

Décidément, cette nouvelle science, la « génétique », a progressé d'une façon surprenante ! Toutes les énigmes qui alimentaient les grands débats sur l'hérédité semblent résolues, et leurs solutions sont d'une élégance à peine croyable. Comment imaginer que, dans un temps si proche du mien, les théories d'Hippocrate et de Darwin sur la pangenèse aient évolué jusqu'à nous doter de cette formidable capacité : modifier la nature même du matériel héréditaire de telle sorte que les espèces puissent se mélanger ! Je ne m'y attarderai pas davantage, mais je vous invite à imaginer mon respect.

Mon état présent, cependant, n'est pas uniquement teinté de respect. Il s'y mêle aussi un certain désarroi : des mots que je croyais connaître, ou qui venaient à peine de recevoir une définition solide, me paraissent étrangers lorsqu'il m'arrive de découvrir leur usage dans les écrits de votre temps. Jusqu'aux termes mêmes de « gène » et de « génétique », qui, à la suite de discussions d'ailleurs fort animées, n'ont vu le jour que récemment : ils semblent à votre époque bénéficier de significations très différentes bien que, ici ou là, je sois encore capable de trouver des références à leur sens initial. Ces mots seraient-ils toujours sujets à débat, près d'un siècle après leur invention ? Je vous demanderai s'il en est ainsi tout spécialement à propos de trois d'entre eux.

Commencerai-je par « gène » ? Est-il vrai que le gène puisse être défini, complètement et de façon satisfaisante, par une seule entité chimique, l'acide désoxyribonucléique, ou ADN ? [...] S'il est à mes yeux délicieux, voire très inattendu, d'apprendre à quel point ce mot est communément utilisé même dans les cours de récréation !, n'y a-t-il aucun doute sur le fait que le « gène » reçoive une définition aussi simple ? Comme vous le savez, le terme a été proposé il y a un an par Wilhelm Johannsen. Or, celui-ci ne l'emploie pas du tout pour désigner une quelconque substance chimique. De fait, Johannsen considère avant tout le « gène » du point de vue de ses conséquences en matière d'hérédité. Et il recommande même de s'abstenir de lui imposer des limites physiques ou théoriques. Connaissez-vous la citation de Johannsen que j'ai recopiée pour vous voir l'encadré : « La naissance du mot "gène" » ? Avec un peu d'hésitation, je vous demanderai donc à nouveau si le « gène » de Johannsen est le même que celui que vous décrivez comme une molécule d'ADN ?

Ma seconde question concerne le mot « génétique » lui-même. Je le vois assez fréquemment mentionné en référence directe, quasi exclusive, aux gènes : parfois comme « l'étude des gènes », et même à l'occasion comme issu du mot « gène » cette dernière affirmation étant une erreur manifeste. Assurément, ces simplifications sont indéfendables. Puisque la « génétique » paraît si intimement liée aux « gènes », et que les gènes sont le plus souvent considérés en termes d'ADN, dois-je comprendre que les généticiens se satisfont d'ancrer si profondément la définition de la « génétique » dans le seul ADN ? Ici, je ne peux pas dissimuler mon désarroi derrière l'ignorance des événements à venir. La génétique est d'abord l'étude de l'hérédité et de la variation ! Vous n'ignorez sans doute pas que le mot a été forgé, il y a cinq ans à peine, par William Bateson. Invité à fournir un titre pour une chaire professorale dédiée à l'étude de l'hérédité, il écrivit les propos suivants au professeur Adam Sedgwick : « S i le fonds Quick devait servir à financer une chaire liée à l'étude de l'Hérédité et de la Variation, la meilleure appellation serait, je pense, "la chaire Quick d'étude de l'Hérédité". Aucun mot simple d'usage courant ne véhicule cette signification. Mais un tel mot est ardemment souhaitable, et si l'on voulait en forger un, "génétique" pourrait faire l'affaire » . L'hérédité et la variation sont des processus d'une infinie complexité et j'ai l'audace de prédire que, même à votre époque, il ne sera pas possible de les réduire à des substances chimiques ou à des entités isolées.

Enfin, j'en arrive au mot « épigénétique ». Avec lui vient immédiatement à l'esprit le processus d'épigenèse. Comme l'a exposé Casper Friedrich Wolff, il y a un siècle et demi, et longtemps avant lui William Harvey, l'épigenèse se rapporte à ces oeuvres mystérieuses de la Nature qui permettent à une structure de se former de novo à partir d'une masse dépourvue de structure en apparence, celle résultant de l'union d'un oeuf et d'un spermatozoïde. Imaginez donc ma surprise en apprenant que « l'épigénétique » devra en finale être comprise comme l'étude des modifications qui, dans les fonctions des gènes, peuvent être héritées mais n'entraînent pas un changement dans la séquence d'ADN. Je suis surpris que les deux définitions aient si peu de points communs et, là aussi, mon parcours de lecture me conduit à l'ADN chimique. Quelle fut la progression logique de la définition originale à la nouvelle ? Mais, davantage encore, cette définition me plonge dans la perplexité. Si quelque chose d' autre que l'ADN peut être modifié et, de façon importante, produire des conséquences susceptibles d'être héritées, pourquoi vos collègues définissent-ils le gène uniquement à l'aide de son composant d'ADN ? Plus précisément, le gène, quand il est décrit par ses composants chimiques une position que, je vous le rappelle, Johannsen désapprouverait certainement !, ne devrait-il pas être défini par tous ses composants, plutôt que par une seule partie de ce qui rend compte de son rôle dans la transmission des caractères ? Comme vous le voyez, avec cette dernière question, j'en reviens à mon interrogation initiale : qu'est-ce que le gène ?

Très respectueusement vôtre,

M. Bacon, voyageur, 9 janvier 1910.

Cher M. Bacon,

[...] Votre lettre se concentre sur trois mots. Pour chacun d'entre eux, vos questions tournent autour de l'attention, en apparence irrésistible, que nous portons à l'ADN, et plus généralement, à la nature physique et chimique de ces « choses » qui font l'hérédité. Votre perception est juste. A partir de votre époque, le désir d'identifier et de purifier les molécules responsables de l'hérédité ne cessera de s'intensifier et aura pour conséquence d'installer fermement l'ADN sous les projecteurs. L'histoire des faits qui se sont déroulés permettra, nous l'espérons, de répondre à certaines de vos questions. [...]

Votre époque est remarquable. Vous êtes le témoin de débats sur la validité de théories d'une immense importance : la théorie darwinienne de la sélection naturelle, la théorie chromosomique d'August Weissman, la théorie des mutations de Hugo de Vries, les théories anciennes de la pangenèse et de l'épigenèse la théorie de la préformation s'était effondrée beaucoup plus tôt, ou, plus récemment, la théorie mendélienne de l'hérédité et la théorie chromosomique due à Theodor Boveri et Walter Sutton. Nous centrerons notre discussion sur ces deux dernières.

A l'époque où vous nous écrivez, William Bateson est le plus franc promoteur de Gregor Mendel, mais il s'avère aussi être un opposant inflexible de la théorie chromosomique ; quant à Thomas Hunt Morgan, il fait preuve d'un profond scepticisme à l'égard de l'une et l'autre. Les arguments de Morgan sont les suivants : la relation mendélienne simple entre les caractères récessifs et dominants ne peut pas expliquer les innombrables variations dans la manifestation de certains traits ; le nombre de chromosomes présents dans le noyau est beaucoup plus petit qu'on doit l'imaginer si chacun représente un simple caractère mendélien : et si un seul chromosome représente en fait de multiples caractères, alors les taux de liaisons entre caractères sont bien moins nombreux que prévu. Mais une idée encore plus dérangeante pour Morgan et Bateson consiste à penser que l'hérédité se réduit à une entité matérielle : il est tout simplement inconcevable qu'une telle entité puisse engendrer les complexités de l'hérédité et du développement. En dépit des études cytologiques de Nettie M. StevensI et Edmund B. Wilson révélant un lien entre le sexe et les chromosomes X et Y, Morgan demande des preuves supplémentaires et Bateson est incrédule : comment les chromosomes, si peu dynamiques, pourraient-ils produire les événements miraculeux du développement ? En résumé, de là où vous êtes, Morgan et Bateson hésitent devant une théorie moléculaire de l'hérédité.

Vous serez donc probablement stupéfié d'apprendre que, dans les cinq années suivant votre lettre, Morgan deviendra le principal promoteur des deux théories, mendélienne et chromosomique ! En juillet de votre année, Morgan s'apprêtera à publier sa propre découverte : le chromosome X de la drosophile est associé à un trait la couleur des yeux qui n'est pas celui du sexe. Une année plus tard, Morgan affirmera que le chromosome X est aussi associé à des traits concernant la pigmentation du corps et la structure des ailes. Ces découvertes montreront qu'il est irraisonnable de considérer le chromosome X comme une structure « guidant » simplement le dimorphisme sexuel et forceront Morgan à admettre que la base de l'hérédité puisse bien être associée, de façon intime, à une structure physique. En 1911, Morgan écrira donc : « C e qui est de la plus haute importance, c'est la découverte que le chromosome X ne contient pas seulement l'un des facteurs essentiels de la détermination du sexe, mais aussi tous les autres caractères qui sont liés au sexe dans l'hérédité 1 . »

Dans ce remarquable article de 1911, Morgan discutera plusieurs autres observations fondamentales : les bases de la liaison entre traits, la théorie de la recombinaison entre gènes sur un seul chromosome, la possibilité qu'un seul gène puisse influencer davantage qu'un caractère et, enfin, la nature des mutations génétiques ! Ces observations vont convaincre Morgan que non seulement la théorie chromosomique est correcte, mais aussi que Mendel avait vu juste. Mais il y a encore plus important pour notre discussion : l'acceptation complète des deux théories, mendélienne et chromosomique, conduira Morgan à accepter la nature physique du gène. Voici ce qu'il écrira : « L a ségrégation, le point clé de tous les phénomènes mendéliens, doit se manifester dans la séparation, durant la maturation de l'oeuf et du sperme, des corps matériels substances chimiques [les parenthèses sont de Morgan] contenues dans les chromosomes » 2 .

Dès 1915, Morgan, Alfred H. Sturtevant, Hermann J. Muller et Calvin B. Bridges publieront leur traité de référence, Le mécanisme de l'hérédité mendélienne , puis, en 1917, Morgan défendra son point de vue avec élégance dans « La théorie du gène », un article publié dans The American Naturalist . Il écrira : « J usqu'ici, j'ai parlé du facteur génétique comme d'une unité dans le plasma germinatif dont la présence est déduite du caractère lui-même. Pourquoi, peut-on se demander, n'est-il pas plus simple de traiter des caractères eux-mêmes, comme le fit Mendel, plutôt que d'introduire une entité imaginaire, le gène ? Il y a plusieurs raisons pour lesquelles nous avons besoin d'une conception du gène 3 . » A ce point de son exposé, Morgan dresse une liste de ces raisons pertinentes et contraignantes, et il conclut : « T outes ces preuves ont joué un rôle pour nous persuader que les gènes postulés pour l'hérédité mendélienne ont une base réelle et sont localisés sur les chromosomes 4 . » Ainsi s'ouvrira une nouvelle phase de la génétique, où l'on abandonnera progressivement les discussions sur l'existence des gènes, dans lesquelles les gènes étaient définis par leurs conséquences sur les traits, pour se concentrer principalement sur la détermination de la nature physico-chimique du gène, un effort qui se focalisera vite sur l'acide nucléique, l'ADN. [...]

Oui, c'est vrai. L'ADN dont vous avez tant entendu parler est une simple substance chimique. Nous comprenons que, à votre époque, on préfère penser que les protéines sont le support matériel de l'hérédité : leur variabilité sans limites, dans leur forme et leur composition, semble si bien s'accorder avec la complexité des traits hérités. Cependant, le courant s'inversera, lentement à vrai dire. En 1928, Frederick Griffith découvrira qu'une version non pathogène de la bactérie pneumococcus peut se transformer en une redoutable version pathogène par une simple exposition à une préparation d'une souche pathogène, pourtant préalablement tuée par chauffage. Cette observation démontrera que le matériel génétique susceptible de conférer un caractère pathogène réside dans une substance inanimée qui, de plus, peut se déplacer d'un organisme à un autre ! Persuadés que l'identité du matériel transformé révélera la nature chimique du gène, Oswald T. Avery, Colin MacLeod et Maclyn J. McCarty démarreront des recherches qui les conduiront à annoncer en 1944, au plus grand étonnement de leurs collègues, que le matériel de transformation n'est certainement pas de nature protéique, mais de l'ADN.

Cette nouvelle sera accueillie avec un grand scepticisme. Mais les années ultérieures verront le développement de technologies révolutionnaires et une accélération dans la course à la détermination de la véritable nature chimique du gène. En 1952, Alfred Hershey et Martha Chase publieront des données suggérant fortement que l'ADN est la substance chimique infectieuse d'un bactériophage, c'est-à-dire d'un virus attaquant les bactéries. Pour la plupart des scientifiques et des historiens, cette expérience définit sans ambiguïté la nature du gène. C'est de l'ADN. [...]

Nous espérons que ce résumé malhabile de quelque quatre-vingt-dix ans de recherches entre nos époques respectives permet d'expliquer pourquoi nous nous soucions tant de l'ADN. En résumé, l'acceptation des théories mendélienne et chromosomique de l'hérédité et leur promotion par Morgan et ses collègues établiront l'idée que le gène est une particule. Une fois que ce concept est accepté, de grands efforts seront réalisés pour identifier la nature chimique du gène ; quand cette tâche sera accomplie, le gène et avec lui toute la génétique en viendra à être défini en termes de substance chimique, l'ADN. Et, vous, pensez-vous que cette position soit correcte ? [...]

Très sincèrement vôtre,

C.-T. Wu et J. Morris, 13 octobre 2000

Chers C.-T. Wu et J. Morris,

Votre lettre est arrivée par le courrier de ce matin et, depuis, elle n'a quitté ni ma main ni mon esprit. [...] Vous êtes trop aimables pour me demander mon opinion. De quelle utilité pourrait-elle être ? Cependant, comme vous avez été plus que généreux dans vos pensées, j'y consens : il n'y a aucune autre manière, je le crains, de vous retourner la faveur dont vous avez fait preuve à mon égard. Donc, avec tout le respect dû aux années qui nous séparent, et en requérant d'avance votre tolérance, je m'aventure avec ce qui suit.

Premièrement, je suis tout à fait surpris que l'étude des bactéries et de leurs virus ait réussi à convaincre si efficacement la communauté quant à la nature chimique du gène. N'y aura-t-il aucune exigence de preuves impliquant une diversité d'organismes ? Mon bureau croule sous des notes concernant des plantes à fleur, Piseum, Hieracium et autres, les volailles, lapins et papillons de Bateson, les cochons d'Inde de Castle, les oursins de Boveri, les scarabées, la mouche, le serpent ou l'étoile de mer. Qu'adviendra-t-il de l'étude de tous ces organismes ? Suffira-t-il de quelques décennies pour démontrer que les bactéries de van Leeuwenhoek, aussi bien que leurs tout petits parasites, sont des représentants, vrais et valides, de nous tous ?

Mais, de façon plus importante, vous désirez savoir si je pense que la définition des « gènes », et même de toute la « génétique », en termes d'acide nucléique ADN est correcte, si je pense que l'histoire à venir rendra justice à la génétique. Je vous prie de m'excuser, mais je répondrai sans réserve : non ! Les événements à venir font certes grande impression sur moi, et j'entrevois que, bientôt, je me réconcilierai avec la théorie moléculaire ; cependant je continuerai à penser que toute l'hérédité ne peut pas reposer uniquement aux pieds de quatre bases azotées. Souvenez-vous seulement de ma requête, dans ma lettre initiale, à propos de la définition du mot « épigénétique ». Votre emploi de ce mot implique que des substances autres que l'ADN affectent l'hérédité, et donc, j'insiste à nouveau, pourquoi ces substances sont-elles si profondément ignorées par vos chimistes ? Quelles sont ces autres substances ? Tout se passe comme si, après la découverte d'une nouvelle fleur, nous choisissions d'abord de célébrer sa couleur et que, plus tard, on ne l'identifie et la définisse communément que par sa couleur. Qui ne criera pas à la tricherie si, plus tard, cette fleur se trouve avoir un parfum capiteux mais, la fleur ayant été d'abord décrite par sa couleur, son parfum ne pouvait pas ensuite être considéré comme l'un de ses traits constitutifs ? S'il y a des éléments qui, outre l'ADN, sont responsables de la transmission d'un trait, je vous exhorte à ce qu'ils prennent place au centre de la théorie moléculaire du gène.

Mais j'ai été trop loin, et je crains maintenant vos reproches. Si seulement l'abominable temps anglais m'avait autorisé à faire mon habituelle promenade cet après-midi, je n'aurais pas eu le temps de radoter ainsi !

Respectueusement,

M. Bacon, 3 février 1910
1 T.H. Morgan, « An attempt to analyze the constitution of the chromosomes on the basis of sex-limited inheritance in Drosophila », J. Exp. Zool, 11 , 409, 1911.

2 Id. p. 383.

3 T.H. Morgan, « Theory of the gene » , Am. Nat., 51 , 517, 1917.

4 Id., p. 520.
LA NAISSANCE DU MOT « GÈNE »
« Il n'y a eu aucun doute sur le fait que les gamètes contiennent "quelque chose" qui est responsable d'un trait de l'organisme nouvellement conçu, ou qui l'influence. Le zygote, qui résulte de la fusion des gamètes durant la fertilisation, contient le "quelque chose" fourni par chaque gamète. Ce "quelque chose", auquel on peut attribuer le trait de l'organisme, on le désigne habituellement par le très ambigu "Anlage". De nombreux autres termes ont été proposés, mais ils sont tous malheureusement associés à des conjectures. Le terme le plus traditionnellement utilisé à la place de "Anlage" est "pangène", qui est dû à Darwin. Mais ce mot est un choix malheureux, parce qu'il est une combinaison de deux mots grecs pan , signifiant tout, tout le monde ; gen , signifiant "en devenir". Or, seule la signification du second convient pour décrire ce "quelque chose" qui, dans les gamètes, peut ou pourrait contribuer à un trait d'un organisme en développement. Aucune hypothèse sur la nature de ce "quelque chose" n'est de ce fait mise en avant ou ne sert à le fonder. Donc, il semble qu'il soit plus simple de n'utiliser que la dernière syllabe, "gène", empruntée au terme bien connu de Darwin, puisque lui seul semble nous intéresser. Ainsi, nous dirons désormais simplement gène à la place de pangène. Ce mot est totalement libre de toute hypothèse ; il exprime le seul fait, prouvé avec certitude, que, dans n'importe quel cas, de nombreuses caractéristiques d'un organisme résultent de conditions spéciales, séparables et donc indépendantes, en résumé ce que nous appellerons simplement "gènes", et qui sont présents dans les gamètes . »

W. Johannsen, Elemente der exakten Erblichkeitslehre, Gustav Fischer, Iena, 1909.
SAVOIR
A lire :

-A. Pichot, Histoire de la notion de gène , coll. « Champs » Flammarion, 1999.

-B. Lewin, Gènes VI , DeBoeck Université, 1999.

-P. Sonigo, J.J. Kupiec, Ni Dieu, ni gène , Seuil, Paris, 2000.

 

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LA TRANSGENÈSE ET SES APPLICATIONS

 

 

 

 

 

 

 

Texte de la 30ème conférence de l'Université de tous les savoirs réalisée le 30 janvier 2000 par Louis-Maris Houdebine

LA TRANGENESE ET SES APPLICATIONS


Les découvertes des cinquante dernières années nous ont familiarisé avec lidée que la vie nest quun ensemble de réactions physico-chimiques qui se déroulent à lintérieur despaces bien délimités, les cellules. Ces actions sont effectuées pour une part essentielle par des protéines (enzymes, facteurs sanguins, hormones, anticorps, etc.) Les protéines de tous les organismes vivants sont composées des mêmes vingt acides aminés assemblés les uns derrière les autres pour former des chaînes dont la longueur est très diverse. Les protéines peuvent contenir de quelques unités à quelques milliers dacides aminés. Le nombre de combinaisons théoriques des vingt acides aminés est considérable et lensemble des protéines existantes ne représente quune faible partie des possibilités. Lactivité biologique des protéines est directement liée à lenchaînement des acides aminés mais dune manière très complexe. Les chaînes formant les protéines se replient de multiples manières qui sont définies par la séquence des acides aminés. Ces repliements forment les sites actifs des protéines.

La découverte des protéines sest accompagnée de la mise en évidence dune molécule omniprésente dans les organismes vivants : lacide désoxyribonucléique ou ADN qui renferme linformation génétique. Cette molécule est formée dune chaîne de phosphate et de désoxyribose sur laquelle sont accrochées quatre structures appelées bases et symbolisées par les lettres ATGC.

De multiples observations ont montré quun gène est constitué par une région de la chaîne dADN et quà un gène correspond essentiellement une protéine. Des études systématiques ont permis détablir que la succession des bases dans un gène définit directement lenchaînement des acides aminés de la protéine correspondante selon un code universel : le code génétique. Trois bases successives déterminent ainsi quel acide aminé doit participer à la formation de la protéine.

LADN peut donc considérer comme une banque de données dont la cellule fait usage en fonction de ses besoins en protéines. Une copie dun gène sous la forme dun acide ribonucléique messager (ARNm) est formé à la demande de la cellule et décrypté pour synthétiser la protéine correspondante. Ces faits établis il y a bientôt quarante ans définissaient déjà tout le principe du génie génétique. En effet, si les messages génétiques contenus dans lADN ne sont définis que par la succession des quatre bases, il doit être possible de modifier ces messages voire den créer de nouveaux dès lors que lon maîtrise la chimie de lADN. Les techniques essentielles qui permettent de manipuler ainsi lADN ont été définies il y a maintenant un peu plus de vingt ans et avec elles est né le génie génétique qui est désormais un outil très largement utilisé dans de nombreux laboratoires.

Il est admis quil y a une continuité stricte entre la matière inorganisée qui a précédé le Big Bang il y a quinze milliards dannée et la matière très organisée que constituent les organismes vivants apparus sur la terre il y a quatre milliards dannées. Les minéraux représentent un état de complexité intermédiaire.

Les organismes vivants sont eux-mêmes dune complexité très variable qui va croissante des bactéries aux mammifères et à lhomme en passant par les levures et les plantes. Très logiquement, on constate que les organismes vivants les plus complexes sont ceux qui ont le plus grand nombre de gènes. Les bactéries ont ainsi de 350 à 4000 gènes, les levures environ 6000, un des plus petits animaux connus de la famille des nématodes 19099, les plantes environ 20000 et lhomme autour de 100000 (le chiffre proche de la réalité sera connu au cours de lannée 2000). Ces données sont particulièrement révélatrices de la manière dont lévolution a procédé pour faire émerger les différentes espèces. Les mammifères sont en effet beaucoup plus complexes que les bactéries et ils nont pourtant que 50 fois plus de gènes. Les biologistes savent déjà que les gènes, les protéines et les molécules qui en dérivent sont capables dinteragir de manière de plus en plus complexe au fur et à mesure que lorganisme est lui-même devenus plus évolué. La complexité du vivant naît donc au moins autant dune combinatoire de plus en plus sophistiquée de molécules qui le compose que dune accumulation des informations génétiques primaires.

1/ Des gènes au génie génétique

Ces faits ont une répercussion directe et profonde sur les expériences impliquant le génie génétique. Les techniques actuelles permettent virtuellement disoler nimporte quel gène, den étudier la structure, de le modifier et de le réintroduire dans une cellule ou un organisme vivant. Cette dernière opération est une des plus essentielles. Un gène peut en effet se comparer à une bande magnétique. Tous les deux contiennent des messages linéaires codés et aisément modifiables. Ces messages sont en soi inertes. Ils nont dintérêt que par les produits qui en sont issus : une image ou un son dans un cas, une protéine dans lautre cas. Une différence fondamentale existe toutefois entre les deux systèmes ; le lecteur de bande magnétique est indifférent au message quil décode ce qui nest le plus souvent pas le cas pour les gènes dans la mesure où les protéines peuvent agir sur la cellule ou sur lorganisme entier qui les synthétisent.

Un gène peut dans une certaine mesure être comparé à un micro-ordinateur qui contient un message spécifique. Lintroduction dun gène isolé dans une cellule et à fortiori dans un organisme entier revient alors à connecter le micro-ordinateur à un réseau de micro-ordinateurs déjà interconnectés et interagissant. Une telle incursion peut enrichir le réseau de manière harmonieuse ou à linverse perturber profondément son fonctionnement.

La transgenèse est lopération qui consiste à ajouter un gène étranger à un organisme pluricellulaire (plantes ou animaux) entier ou à remplacer un des ses gènes par un autre. Il est bien évident que dans lun et lautre cas, les effets du transgène sur lorganisme ne peuvent être totalement prévisibles aussi bien connues que soient les propriétés du gène étranger et de la protéine correspondante. La transgenèse est donc par essence un retour au complexe, lisolement dun gène et son étude in vitro étant au contraire une étude volontairement réductionniste. Les conséquences dune transgenèse sont donc à priori inévitablement en partie inconnues. La gestion du complexe que représentent lagriculture et lélevage est en réalité une activité très familière pour les communautés humaines. La sélection génétique consiste classiquement à repérer les effets biologiques intéressants (prolificité, résistance aux maladies etc.) apparus spontanément chez quelques individus au hasard de la redistribution des gènes lors de la reproduction sexuée et de mutations résultant derreurs dans la réplication de lADN. La reproduction privilégiée des individus dotés des propriétés biologiques intéressantes conduit progressivement à létablissement de lignées ou de races. Cette méthode de sélection a largement fait ses preuves et nous en bénéficions grandement. La sélection classique est toutefois une opération le plus souvent réalisée en aveugle. Le sélectionneur ne sait en effet le plus souvent rien des gènes quil a sélectionnés ni de leurs effets individuels. Seul le résultat global est généralement pris en compte. Le remaniement des chromosomes dans les cellules germinales consiste à redistribuer les gènes parentaux de manière aléatoire. Ceci explique que les enfants dun même couple sont différents. Le remaniement des chromosomes parentaux concerne de longs segments dADN qui portent de nombreux gènes contigus. La sélection dun gène ayant un intérêt biologique attendu saccompagne donc inévitablement de la co-sélection de gènes voisins inconnus dont les effets ne sont pas toujours bénéfiques. Ainsi, des taureaux, des verrats, etc. retenus comme géniteurs en raison de leur potentiel génétique intéressant savèrent parfois à lusage porter également un gène parfaitement nuisible pour lélevage. Ces géniteurs doivent alors être éliminés non sans parfois avoir entraîné des pertes financières importantes. Il en est de même pour la sélection végétale.

La transgenèse évite, par essence, une bonne partie de ces effets imprévisibles. La modification génétique quelle représente a des effets en grande partie attendus, dans la mesure où les propriétés du gène étranger sont elles-mêmes connues. La transgenèse ne correspond par ailleurs quà une seule modification génétique de lorganisme. La transgenèse vue ainsi est donc en principe moins hasardeuse que la sélection classique. Tout bien considéré, les mutations obtenues par transgenèse ne sont généralement pas plus complexes que celles engendrées par les mécanismes naturels à chaque cycle de reproduction. La gestion des organismes transgéniques peut donc logiquement sinspirer de celle des organismes obtenus par sélection classique.

2/ Les techniques de transfert de gènes

Le transfert dun gène isolé à un organisme nest quexceptionnellement un phénomène spontané. Si tel nétait pas le cas, lintégrité des espèces ne serait pas une réalité puisque les organismes vivants sont très fréquemment en contact direct avec lADN dautres espèces. Les virus qui ne sont constitués que de quelques gènes associés à des protéines ont une capacité exceptionnelle à pénétrer dans les cellules. Ce processus que lon nomme une infection est primordiale pour le virus qui doit absolument utiliser la machinerie cellulaire dont il est dépourvu pour se répliquer. Lintroduction de gène étranger destiné à obtenir des organismes transgéniques requiert donc des méthodes expérimentales variées. La plus utilisée chez les animaux consiste à procéder à une microinjection directe du gène isolé en solution dans le noyau ou le cytoplasme dun embryon au stade une cellule. Dans une petite proportion de cas (de lordre de 1%) le gène étranger sintègre à LADN de lembryon et se transmet ainsi à ses cellules filles puis à sa descendance.

Cette méthode ne peut être appliquée aux végétaux. Deux techniques sont dans ce cas le plus souvent utilisées. Lune consiste à introduire le gène étranger dans un vecteur dérivé dune bactérie. Celui-ci pénètre aisément dans la cellule végétale et sintègre dans son ADN. Lautre méthode est utilisée pour les végétaux ne pouvant bénéficier du vecteur. Elle consiste à faire pénétrer de force des microbilles métalliques enrobées dADN contenant le gène étranger dans les cellules végétales en les projetant à haute vitesse. Dans lun et lautre cas, le transfert de gène doit être suivi dune régénération complète dune plante à partir de la cellule ayant subi la modification génétique.

Laddition de gène est lopération la plus simple et de loin la plus fréquemment pratiquée. Le remplacement spécifique de gène est également hautement souhaitable. Il permet en pratique de remplacer un gène de lorganisme par un gène inactif (ceci revient alors à supprimer sélectivement un gène de lorganisme) ou par un autre gène actif. Cette opération nest actuellement possible que chez les animaux (et les microorganismes). Elle implique en effet que lADN étranger contenant le gène de remplacement reconnaisse très spécifiquement le gène ciblé pour pouvoir se substituer à lui par un processus de recombinaison homologue. Cette opération nest finalement couronnée de succès que si la cellule dans laquelle a eu lieu le remplacement de gène peut donner naissance à un organisme entier. Cette régénération très couramment pratiquée chez bon nombre de plantes est particulièrement malaisée chez les animaux. En pratique, la cellule animale modifiée doit être celle dun embryon précoce capable, une fois introduite dans un embryon précoce hôte, de participer au développement de lorganisme jusquà transmettre la mutation à la descendance. Cette méthode laborieuse est utilisée depuis plus de 10 ans mais, pour des raisons techniques, chez la souris seulement. Le remplacement de gène par recombinaison homologue a donc pendant une décennie été réservée à cette seule espèce.

Une autre approche très séduisante peut en principe reposer sur la technique de clonage des animaux. Cette technique mise au point il y a environ quinze ans consiste à reconstituer léquivalent dun embryon en introduisant le double stock de chromosomes dune cellule dans un ovocyte préalablement énucléé. Ceci na pendant longtemps été possible quen partant de cellules embryonnaires non différenciées (totipotentes) et non cultivées. Des améliorations techniques relativement minimes ont permis dobtenir des clones de moutons en partant de cellules embryonnaires totipotentes cultivées (un an avant la naissance de Dolly) puis à partir de cellules fStales différenciées et enfin de cellules adultes. Ces expériences ont été menées essentiellement pour tenter de simplifier la technique de transgenèse. Il est en effet en principe possible de transférer des gènes étrangers dans des cellules cultivées utilisées ensuite pour engendrer des animaux qui se trouvent être transgéniques. Laddition de gène a ainsi été couronnée de succès (naissance de Polly) un an après la naissance de Dolly. En 1999, le remplacement de gène chez les moutons a pu être obtenu par recombinaison homologue par le même procédé.

Laddition de gène est ainsi simplifiée et le remplacement de gène est devenu possible chez les ruminants domestiques et très vraisemblablement chez dautres espèces dans le futur.

Les fragments dADN qui sont utilisés pour la transgenèse sont généralement construits au laboratoire pour diriger lexpression du gène étranger spécifiquement dans un tissu donné. La connaissance limitée que lon a actuellement du mode de fonctionnement des gènes ne permet encore quune approche empirique raisonnée dans la construction des futurs transgènes. Des progrès rapides récents dans ce domaine laisse prévoir pour un avenir assez proche un contrôle satisfaisant du fonctionnement des transgènes dans la majorité des cas.

3/ Les applications de la transgénèse

La transgenèse, a dès ses débuts chez les animaux en 1981 puis en 1983 chez les plantes, été définie avant tout comme un outil de recherche. Laddition ou le retrait dune information génétique dans un organisme entier est en effet un moyen incontournable pour déterminer les mécanismes moléculaires qui contrôlent le fonctionnement des gènes et le rôle des gènes eux-mêmes dans lexpression des fonctions biologiques. Lidentification systématique et massive des gènes de certains organismes par le séquençage complet de leur ADN va logiquement être suivie dune utilisation plus intense de la transgenèse chez quelques organismes modèles comme la souris et le tabac.

La maîtrise du vivant que représente la transgenèse a rendu possible des applications nouvelles dans le domaine médical et agronomique. Létude des maladies humaines ne peut se passer de modèles animaux. Les modèles pertinents résultant de mutations spontanées sont rares. Dans le meilleur des cas, des modèles particulièrement précieux peuvent être obtenus par addition ou remplacement de gènes. Cest surtout la souris qui est sollicitée en raison de son faible coût dutilisation. Dautres espèces sont parfois nécessaires pour diverses raisons, cest le cas notamment du rat, du lapin, du porc et des primates non humains. Cette approche expérimentale est devenue récemment plus simple et potentiellement plus utile à la suite de lamélioration des techniques de transgenèse.

Les animaux et les plantes sont depuis des temps immémoriaux la source de substances dotées de propriétés pharmacologiques. Ces substances nont, par le passé, été que rarement des protéines. Jusquà une époque récente en effet, un nombre relativement petit de protéines était connu et seulement quelque unes dentre elles pouvaient être extraites pour être administrées à lhomme. Cétait le cas de linsuline de porc pour le traitement des diabétiques. Le génie génétique offre la possibilité de préparer virtuellement nimporte quelle protéine en abondance en transférant le gène correspondant dans des bactéries, des levures, des plantes ou des animaux. Linsuline et lhormone de croissance humaine proviennent désormais essentiellement de bactéries recombinées. Plusieurs dizaines de protéines dintérêt pharmaceutique ont été obtenues à partir du lait danimaux ou de plantes transgéniques. La première protéine extraite ainsi du lait doit être mise sur le marché en 2000. Beaucoup dautres suivront et on peut considérer quune nouvelle branche de lindustrie pharmaceutique est née.

La transgenèse peut jouer un rôle décisif dans le domaine des greffes dorganes. Plusieurs milliers de personnes meurent chaque année en France par manque de greffon humain. Limpossibilité quil y a et qui persistera sans doute longtemps de remédier à cette situation a fait resurgir une idée déjà ancienne. Certains organes ou cellules des animaux et notamment ceux du porc pourraient probablement être utilisés à la place de matériel humain. Les rejets extrêmement violents des organes animaux ont jusquà maintenant empêchés les xénogreffes de devenir une réalité. Des succès partiels mais bien réels ont été obtenus dans la dernière décennie du XXème siècle. Des cSurs et des reins de porcs transgéniques abritant des gènes capables dinhiber le système du complément humain responsable du rejet hyper-aigu des éléments étrangers ont pu être maintenus, intègres, pendant plusieurs semaines après avoir été greffés à des singes.

De multiples obstacles, y compris dans le domaine de la connaissance des mécanismes de rejet, restent à franchir pour que la xénogreffe devienne une réalité médicale. La xénogreffe peut toutefois dans lavenir concerner plus les cellules qui sont moins sujettes aux rejets que les organes. La démonstration récente que des cellules embryonnaires humaines peuvent être différenciées in vitro en cellules souches dorganes laisse penser que des cellules humaines préparées de cette manière pourraient être dans lavenir utilisées plutôt que leurs homologues dorigine porcine. La situation actuelle incite à imaginer que la xénogreffe ou la greffe à partir de cellules humaines différenciées pourraient être retenues comme moyen thérapeutique au cas par cas en fonction des problèmes à résoudre. Le transfert de gène dans les cellules ou via la transgenèse pourrait permettre aux cellules porcines non seulement dêtre mieux tolérées mais également dapporter des protéines ayant une activité thérapeutique. Une thérapie génétique serait alors réalisée en même temps quune thérapie cellulaire.

Les applications agronomiques de la transgénèse commencent à être significatives, en ce qui concerne les végétaux. Elles sont, pour des raisons techniques, tout juste naissantes chez les animaux. La transgenèse permet dans certains cas de conférer aux plantes et aux animaux une résistance contre les maladies. Ceci se traduit ou se traduira par une moindre utilisation de pesticides et dantibiotiques ainsi que par une simplification de la tâche des agriculteurs et des éleveurs. La résistance des animaux à des maladies devenue ainsi génétiquement transmissible a par ailleurs toutes les chances de réduire la souffrance des animaux, de permettre de consommer des viandes plus saines et diminuer la fréquence des zoonoses.

Certains projets de transgenèse nont dautre but que de réduire la pollution. Des porcs transgéniques expérimentaux rejettent ainsi deux fois moins de phosphate dans lenvironnement. Des plantes transgéniques ont été spécialement conçues pour capter certains ions métalliques toxiques présents spontanément dans le sol ou apportés à la suite dune activité industrielle.

Des plantes capables de se développer dans des sols salés ou alcalins impropres à lagriculture ont été obtenues par transgenèse. Ceci permet denvisager de conquérir de nouvelles terres.

La modification volontaire de la composition des plantes ou des animaux via la transgenèse peut permettre de fournir aux consommateurs des aliments plus riches en éléments essentiels voire plus sapides. Le riz doré capable dapporter un supplément de vitamine A aux 400 millions dêtres humains qui en manquent et sont menacés de devenir aveugles ainsi que de fer aux 4 milliards de personnes carencées est un exemple éloquent. Le transfert de plusieurs gènes a dû être réalisé pour atteindre ce but.

Diverses améliorations des produits animaux sont également envisagées. Elles concernent la composition du lait, des graisses, de la carcasse, de la laine, etc.

Il est intéressant de mentionner également que les végétaux qui sont déjà la source de molécules non destinées à l'alimentation humaine ou animale vont de plus en plus être sollicités pour servir comme base à la synthèse de plastiques biodégradables, de carburants, etc. La transgenèse peut dans certains cas apporter des solutions uniques ou originales et très satisfaisantes.

4/ Les problèmes posés par la transgenèse

La transgenèse est actuellement vue surtout par ses applications très marginales mais spectaculaires dans lalimentation humaine. Les OGM (organismes génétiquement modifiés) ont très mauvaise presse. Ce fait ne laisse de surprendre la majorité des biologistes qui considèrent que la transgenèse appliquée à lalimentation est à priori une des techniques puissantes les moins dangereuses que lhumanité ait inventées. Certes, un organisme transgénique est par définition en partie inconnu, mais cela est aussi le cas dun organisme obtenu par sélection classique ou dun aliment exotique. Les tests classiques de toxicité, oncogénicité et allergénicité accompagnés dune traçabilité raisonnable doivent pouvoir réduire les risques à un niveau bien inférieur à celui de beaucoup dautres techniques très généralement acceptées. Il est incontestable que certaines plantes, transgéniques ou non, posent des problèmes environnementaux dont limportance ne peut pas être aisément évaluée. Les modèles de laboratoire ne peuvent en effet que difficilement prendre en compte de manière satisfaisante des paramètres comme lespace et le temps. Les biotechnologistes ont quelque difficulté à imaginer comment leurs actions dans le domaine agronomique pourraient faire ne serait-ce que dix ou cent fois moins de victimes que lautomobile. Les réticences actuelles des consommateurs ne sont toutefois pas incompréhensibles. Toute nouveauté effraie. Les condamnations actuelles des OGM ressemblent à sy méprendre à celles appliquées aux vaccins il y a un siècle. Il est vrai quune désinformation qui a atteint un niveau peu commun ne fait quentretenir la confusion. Les critiques vis à vis des OGM sont en fait bien souvent dirigées plus contre la société libérale mal contrôlée que contre la technique elle-même. Les OGM en font actuellement les frais. Il est vrai que leur utilisation ne devrait pas tomber sous la coupe dentreprises qui détiennent des monopoles de fait. Lobtention du riz doré financée par lUnion Européenne et la fondation Rockefeller indique que la situation est bien plus ouverte et diverse que certains ne le prétendent. Les réticences des pays riches vis à vis des OGM ne sont pas partagées par ceux qui souffrent de pénuries alimentaires. Les chinois consomment ou utilisent actuellement au moins sept plantes transgéniques. Il ne semble pas que ces cultures se fassent sans contrôle. Les agriculteurs chinois sappuient en effet sur les résultats des expériences réalisées dans les pays développés et notamment les USA. Lavenir de lagriculture ne peut reposer sur un retour aux techniques anciennes, pas plus que la médecine traditionnelle ne saurait être un remède à certaines dérives des pratiques médicales modernes. Une application raisonnée des techniques agronomiques modernes, y compris de la transgenèse, paraît plus appropriée. En face de la demande croissante des consommateurs humains, le principe de précaution invite à mettre à notre disposition toutes les techniques de transgenèse pour optimiser les productions végétales et animales, quitte à ne pas les utiliser si des alternatives au cas par cas savèrent tout aussi efficace.

La transgenèse appliquée à lespèce humaine est en principe possible. Tout le monde ou presque saccorde pour considérer quune telle opération ne devrait comporter aucun risque technique et ne concerner que des activités thérapeutiques. La première condition nest pas actuellement remplie mais on peut imaginer que cela sera un jour le cas. Les thérapies géniques germinales ne peuvent raisonnablement concerner que le remplacement de gènes responsables de maladies humaines par leurs homologues non mutés. Ce type dopération est et restera probablement difficile et elles devront être accompagnées de contrôles stricts pour sassurer que la modification génétique induite est bien celle que lon attendait. Cette approche thérapeutique se trouverait en compétition directe avec le tri des embryons portant les gènes défectueux. Il y a tout lieu de penser que la deuxième solution paraîtra majoritairement comme la plus satisfaisante.

La modification du patrimoine génétique dun être humain non destinée strictement à remplacer un gène défectueux par un gène sain paraît difficilement envisageable sans risque. Laddition dun gène, conférant une résistance vis à vis dune maladie infectieuse, paraît séduisante à première vue. Nul ne peut prévoir tous les effets du transgène et ce qui est acceptable pour les animaux et les plantes ne lest plus pour l'espèce humaine. Il est concevable de procéder à des transgènes réversibles. Ceci ne paraît pas suffire à justifier lutilisation de cette technique pour l'espèce humaine.

Les générations qui nous suivront trouveront peut-être légitime et souhaitable de modifier le patrimoine génétique humain pour toute sorte de bonnes raisons. On pourrait en effet par exemple souhaiter que les êtres humains soient plus sereins et moins féroces envers leurs semblables ou plus modestement quils aient une vieillesse biologiquement plus douce. Il nest en rien certain que la transgenèse, dans le meilleur des cas, puisse apporter une solution à des problèmes aussi complexes. Quoiquil en soit, il serait sans doute prétentieux de condamner par avance les décisions de nos descendants. Il nous suffit, dans les faits, dêtre pleinement en accord avec nos convictions actuelles. Elles nous indiquent sans ambiguïté que la transgenèse ne doit pas âtre appliquée à lespèce humaine.


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PERTE DE POIDS ...

 

 

 

 

 

 

Perte de poids et maladie : comment le cerveau réduit-il l’appétit et le stockage énergétique ?

Comment lier un état inflammatoire aigu à la perte d’appétit et de poids? Une équipe de l’Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire, en concertation avec deux autres groupes, met en évidence une nouvelle voie de contrôle reliant l’induction d’un choc inflammatoire, la production cérébrale de la chimiokine CCL2, et l’inhibition des neurones produisant la « Melanin concentrating hormone » dans l’hypothalamus, une zone du cerveau contrôlant notre balance énergétique. Cette étude pionnière sur les signaux neuro-immunologiques contrôlant notre poids est publiée dans la revue EMBO Reports.

Chacun l'a expérimenté ou l'expérimentera : atteints d'une maladie générant un état  inflammatoire plus ou moins fort, nous perdons l'appétit et en conséquence, nous perdons du poids.Afin de mieux comprendre la relation entre inflammation et perte de poids, les chercheurs reproduisent un état inflammatoire déclenché par une infection bactérienne, en injectant chez la souris un composant de la paroi de la bactérie, le lipopolysaccharide (LPS). L’injection de LPS chez la souris induit de facto une inflammation aiguë, identifiable par la surexpression de divers médiateurs inflammatoires, comme les cytokines et chimiokines. Elle est aussi associée à une fièvre et une perte de poids transitoires chez les animaux.
De nombreuses molécules inflammatoires, comme les cytokines Il1 béta, IL6 ou TNF alpha, ont été caractérisées et leurs effets démontrés dans la mise en place de ce qui est communément appelé le « comportement de maladie ». Cependant la correspondance entre la surexpression intracérébrale de ces médiateurs et leurs modes d’action sur les réseaux neuronaux impliqués dans de contrôle de l’appétit et du poids corporel restait mal définie.
Dans ce contexte, Carole Rovère et ses collaborateurs, au sein de l’équipe Génomique et Evolution en Neuro-endocrinologie dirigée par Jean-Louis Nahon, en concertation étroite avec le groupe de Nicolas Blondeau dans l’équipe de Catherine Heurteaux (IPMC/ CNRS/ UCA) et l’équipe de Serge Luquet, au laboratoire « Biologie fonctionnelle et adaptative » (CNRS/Université Paris Diderot) ont identifié une molécule inflammatoire particulière, la CCL2, comme un élément clé dans la cascade de signalisation initiée par l’administration du LPS et aboutissant  à la chute d’appétit et de poids. Cette protéine appartient à la famille des chimiokines, connues pour attirer les cellules inflammatoires au site lésé et auxquelles des études scientifiques récentes ont attribué la capacité de moduler l'activité neuronale. Elle est impliquée de fait dans certaines pathologies neurologiques.
En empêchant CCL2 de jouer son rôle par des d’agents pharmacologiques ou en utilisant des modèles d’animaux transgéniques, les chercheurs ont montré que l’effet amaigrissant associé à l’inflammation induite par le LPS était notablement diminué.
Les effets du LPS, qui entraîne une perte d’appétit, une augmentation de la consommation des réserves énergétiques contenues dans la masse grasse et donc une perte de poids, sont quant à eux retrouvés lors de l’injection intracérébrale de CCL2, confirmant ainsi le rôle central de CCL2 dans l’adaptation métabolique à l’inflammation chez la souris.
Les chercheurs ont ensuite identifié la cible de CCL2 dans l’hypothalamus, une zone du cerveau décrite comme le chef d’orchestre du comportement alimentaire. L’hypothalamus est une région complexe, abritant différents types de neurones produisant des molécules capables de moduler positivement ou négativement la prise alimentaire et les dépenses énergétiques. Parmi ceux-ci se trouvent les neurones produisant la « Melanin concentrating hormone » (MCH), un peptide connu pour favoriser la prise alimentaire et réduire les dépenses énergétiques.
En approfondissant leur recherche, les chercheurs ont montré que CCL2 peut agir directement sur les neurones, en se liant à son récepteur CCR2, et diminuer leur activité ainsi que leur capacité à sécréter le peptide MCH. Ainsi, l’action de CCL2 sur les neurones synthétisant la MCH pourrait expliquer en partie la perte d’appétit, l’augmentation des dépenses énergétiques et la perte de poids associées à un état d’inflammation. Cependant d’autres réseaux hypothalamiques, voire cérébraux, seraient la cible de cette chimiokine. Par ailleurs, l’expression d’autres chimiokines et facteurs inflammatoires apparait modifiée après une injection de LPS. Ce sont autant de cibles moléculaires prometteuses pour établir de nouvelles thérapies dans le contexte d’une perte de poids non-consécutive à un régime amaigrissant ou une anorexie mentale.
En conclusion, cette étude, combinant de multiples échelles d’investigation, représente l’exemple le plus détaillé de l’identification d’un mécanisme neuro-immunologique qui pourrait être commun à de nombreuses pathologies inflammatoires. De fait, nous ne sommes qu’aux prémices de l’exploration fonctionnelle des molécules inflammatoires cérébrales responsables des changements comportementaux observés lors d’une stimulation de la réponse immunologique.

 

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A D N

 

 

 

 

 

 

acide désoxyribonucléique (ADN)


Acide nucléique caractéristique des chromosomes, constitué de deux brins enroulés en double hélice et formés chacun d'une succession de nucléotides. (Porteur de l'information génétique, l'ADN assure le contrôle de l'activité des cellules.) (Abréviations : ADN ou DNA [terminologie anglo-saxonne].)
Constituant essentiel des chromosomes, présent aussi dans les mitochondries et les plastes, l'ADN est le support de l'information héréditaire.
La structure de la molécule d’ADN

Assemblage des nucléotides dans l'ADN
La macromolécule d'ADN est constituée de deux chaînes polynucléotidiques enroulées l'une autour de l'autre en forme de double hélice (l’article exposant cette particularité structurale a été publié en 1953 par James D. Watson et Francis H. Crick dans la revue Nature).
Les chaînes sont constituées de maillons, ou nucléotides, comportant chacun un sucre à cinq atomes de carbone (le désoxyribose), une base organique et une molécule d'acide phosphorique. Il existe quatre bases organiques différentes (adénine, thymine, guanine et cytosine, désignées par leur initiale : ATCG) qui s'associent deux à deux selon un ordre rigoureusement invariable (la thymine avec l'adénine, la guanine avec la cytosine), liant ainsi les deux chaînes complémentaires par une liaison chimique lâche : un pont d'atomes d'hydrogène. Une telle structure assure la cohésion de la double hélice, mais ménage la possibilité de séparation des deux chaînes au moment de la division cellulaire (ou mitose).
L'expression génétique
Le bon fonctionnement d'une cellule repose sur deux classes de macromolécules : les acides nucléiques (l'ADN, dépositaire de l'information génétique, et les ARN, impliqués dans la traduction de cette information) et les protéines (produits de la traduction de l'information). Les protéines présentent des activités variées : catalyse (enzymes), stockage de molécules (protéines de liaison), transport actif ou passif à travers les membranes (transporteurs, canaux), communications cellulaires (hormones peptidiques, récepteurs), architecture et mouvement (protéines du cytosquelette), reconnaissance du non-soi (anticorps)…
La relation universelle entre ces macromolécules s'exprime ainsi : toute protéine est codée par un gène, segment d'ADN constituant une unité fonctionnelle. Le nombre de gènes varie selon les organismes (de l'ordre de 2 500 chez les bactéries, de 30 000 chez l’espèce humaine). L'expression d'un gène aboutit à la synthèse d'une protéine spécifique. Chez les organismes pluricellulaires, toutes les cellules disposent du même stock de gènes, hérité d'une cellule initiale unique (l'œuf issu de la fécondation), et pourtant elles ne sont pas toutes identiques, parce qu'elles sont capables de synthétiser plus ou moins – voire pas du tout – les différentes protéines codées dans le génome, en fonction de leur type cellulaire et du stade de développement de l'organisme. Ainsi, l'hémoglobine est produite dans les précurseurs des globules rouges, les anticorps dans les lymphocytes B, l'actine et la myosine dans les cellules du muscle, la kératine dans celles de l'épiderme.
Par ailleurs certaines protéines sont fabriquées uniquement au stade embryonnaire, les phénomènes de développement et de différenciation reposant sur l'expression différentielle d'un matériel génétique commun. De même, chez les organismes adultes, le cycle cellulaire fait appel au contrôle de l'expression des gènes. De nombreuses maladies, dont les cancers, les infections virales, les désordres immunitaires et les réactions allergiques, ainsi que les malformations au cours du développement embryonnaire, découlent de la production excessive ou insuffisante de certaines protéines.
Le contrôle de l'expression génétique est effectué au niveau de la transcription de l'ADN par une famille de protéines, les régulateurs de transcription; ceux-ci sont codés par les gènes régulateurs, qui pourraient représenter de 5 à 10 % du nombre total de gènes chez les eucaryotes supérieurs. Il apparaît que de nombreux désordres génétiques proviennent de mutations affectant les gènes régulateurs.
Le code génétique
À l’intérieur des gènes, les bases sont organisées en triplets appelés codons. La séquence des codons dans l'ADN détermine celle des acides aminés qui constituent les protéines, conférant à chaque protéine sa spécificité. Le code génétique est le code de lecture, linéaire et séquentiel, des codons de l’ADN.
Il existe 20 acides aminés naturels, qui se rencontrent chez tous les êtres vivants, de la bactérie à l'homme. Chaque protéine n'est pas synthétisée directement à partir de l'image de la séquence des nucléotides de l'ADN, mais grâce à un intermédiaire : l'ARN messager, dont la structure est complémentaire de celle de l'ADN, à cette différence que la thymine (T) y est remplacée par l'uracile (U) – les quatre bases de l’ARN sont donc AUGC. Le processus de synthèse de l'ARN messager, à partir de l'ADN chromosomique, est appelé transcription.
Grâce à la spécificité d'appariement entre les bases, l'information contenue dans l'ADN se transmet sans aucun changement à l'ARN. Cette information se trouve dans la séquence des nucléotides, qui détermine celle des acides aminés. À chaque acide aminé de la chaîne protéique correspond une succession de trois nucléotides de la chaîne, conformément à une relation appelée code génétique. Compte tenu que chaque série de trois nucléotides constitue un codon et que quatre nucléotides en s'unissant par trois donnent 64 combinaisons possibles, dans l'hypothèse retenue il y aurait 44 combinaisons « en trop », 44 types de triplets qui ne correspondraient à aucun acide aminé, puisque 20 acides aminés seulement doivent être synthétisés. En réalité on sait maintenant que tous les triplets sont utilisés : certains d'entre eux correspondent à des signes de ponctuation dans la synthèse d'une chaîne polypeptidique, et par ailleurs le code est en quelque sorte « dégénéré », c'est-à-dire que certains acides aminés peuvent être codés par plusieurs triplets différents.
Le déchiffrement du code génétique, c'est-à-dire l'assignation de l'acide aminé correspondant à chacun des codons, fut réalisé en 1965, grâce aux travaux de M. W. Nirenberg et de H. Matthaei et à ceux de H. G. Khorana.
La réplication de l’ADN
La réplication de l’ADN, qui précède toute mitose (division cellulaire), ainsi que la première division de la méiose, permet une duplication de l'information génétique, afin que celle-ci puisse être transmise dans son intégralité aux cellules filles. La réplication de l'ADN commence par l’ouverture partielle de la molécule et la séparation des deux brins, et aboutit à la formation de deux longues molécules d’ADN en tous points semblables. Elle s'effectue selon un modèle dit semi-conservatif, dans lequel chaque brin de la double hélice engendre un brin complémentaire puis s'y associe.
La réplication est un phénomène biochimique très complexe nécessitant la participation de nombreuses enzymes dont le rôle est de dérouler le filament d'ADN, de séparer les deux brins, de synthétiser les brins complémentaires et, enfin, de reconstituer la structure native des brins fils.
Les problèmes topologiques du brin d'ADN
À l'état natif, sous sa forme spontanée au sein de la cellule, l'ADN n'est pas un simple filament. Il est enroulé autour de différentes protéines, et cette structure est elle-même organisée de façon plus complexe en solénoïde ou en superboules. Cet ADN linéaire est donc soumis à des contraintes et à des torsions importantes.
Comme les deux brins qui le constituent doivent être séparés au début de la réplication, l'ADN natif doit d'abord être libéré de ses contraintes et déroulé. Ces changements de conformation sont assurés par des enzymes, les topo-isomérases appelées également déroulases ou relaxases. Les topo-isomérases de type I agissent en coupant l'un des brins de la double hélice pour qu'il se déroule librement.
Cette réaction chimique ne nécessite pas d'énergie (sous forme d'ATP). Les topo-isomérases de type II, ou gyrases, coupent les deux brins de l'ADN. Leur action est inverse des premières, puisqu'elles réalisent des torsions de l'ADN pour relier ensuite les extrémités des brins libérés. Elles permettent de retirer d'éventuels nœuds formés au cours des différentes opérations réalisées sur la double hélice.
Le réplicon
En 1958, Matthew S. Meselson et Franklin W. Stahl réalisèrent une expérience qui confirma la structure en double hélice de l'ADN décrite par Watson et Crick en 1953 et qui, en même temps, révéla quelques propriétés fondamentales de la réplication. Ils ont, dans un premier temps, laissé une bactérie, Escherichia coli, se multiplier sur un milieu contenant l'isotope 15N de l'azote. La culture bactérienne est ensuite transférée sur un milieu contenant un autre isotope lourd, le 14N. Au cours de ces deux étapes, l'azote métabolisé est normalement entré comme constituant des bases de l'ADN. Après un temps de culture permettant l'apparition d'une nouvelle génération de bactéries, les ADN bactériens sont extraits et analysés.
On constate alors qu'il existe deux types d'ADN, caractérisés par une densité différente. Le plus lourd ne comporte que de l'isotope 15 et provient des bactéries qui se sont développées pendant la première culture. L'autre type d'ADN est issu de bactéries de première génération après changement de milieu; il est composé d'un brin à base d'azote 15 et d'un brin à base d'azote 14. Ainsi, le brin contenant l'azote 15 a servi de matrice à son complémentaire formé, lui, avec de l'azote 14, seul disponible dans le second milieu de culture. Le processus semi-conservatif de la réplication était démontré.
En 1963, les études en microscopie électronique de John Cairns sur le chromosome circulaire bactérien ont montré que la réplication débute en un point unique du chromosome. D'autres études ont ensuite montré qu'elle s'effectuait dans les deux sens à partir du point d'initiation. On doit à Huberman et Riggs d'avoir, en 1968, démonté ce mécanisme pour les chromosomes humains ; mais, chez les eucaryotes, l'opération est un peu plus complexe du fait de la longueur des chromosomes. Des examens autoradiographiques ont permis de préciser que les points d'initiation étaient multiples et autorisaient une réplication suffisamment rapide de l'ADN.
Chaque unité de réplication est appelée réplicon, et sa longueur moyenne est d'environ 20 000 à 500 000 paires de bases, soit 3 à 150 mm Si l'on considère qu'un chromosome humain a une longueur moyenne – déroulé – de 51 mm, et que la vitesse de réplication est de l'ordre de 1mm/min, l'opération complète dure moins d'une heure. Tous les réplicons du génome ne sont cependant pas initiés en même temps : on remarque, de façon constante sur les chromosomes, des zones de réplication précoces et d'autres tardives.
Le mécanisme de la réplication
Le détail de ces mécanismes a pu être connu, chez les procaryotes (bactéries) par l'étude d'un grand nombre de mutants. Dans un premier temps, les deux brins de la double hélice sont séparés localement l'un de l'autre par des enzymes appelées hélicases. Elles se fixent sur l'un des brins, le coupent et le déroulent. Les brins séparés d'ADN sont ensuite stabilisés dans cette conformation par la fixation de protéines particulières, les protéines SSB (Single Stand Binding), et rapidement tout l'ADN simple brin est recouvert par ces tétramères.
La réplication proprement dite commence par la synthèse d'un acide ribonucléique (ARN) réalisée par un complexe enzymatique appelé primosome. Celui-ci est constitué de différentes molécules, dont des protéines qui assurent la reconnaissance du site où la synthèse doit être initiée. Ensuite, l'ADN polymérase III synthétise le brin d'ADN complémentaire à partir de l'amorce d'ARN en utilisant l'un des deux brins d'ADN libre comme matrice. Les protéines SSB sont chassées au fur et à mesure de la progression de la synthèse. Deux molécules d'ADN polymérase III, enzyme complexe composée de sept sous-unités, sont associées au niveau du point de réplication permettant ainsi la duplication simultanée des deux brins de l'ADN. Les brins complémentaires sont synthétisés de façon discontinue sous la forme de petits éléments, appelés fragments d'Okasaki. À la fin de la réplication du réplicon, les amorces d'ARN sont détruites par une ARNase (une enzyme), et les lacunes ainsi formées sont comblées par la synthèse de fragments d'ADN, grâce à l'action de l'ADN polymérase I. Enfin, une enzyme ligase effectue les liaisons entre les différents fragments d'Okasaki.
Le mécanisme de la réplication est moins bien connu chez les eucaryotes. Les résultats montrent toutefois que celui-ci est relativement proche de celui observé chez les procaryotes. Les différences connues portent essentiellement sur les polymérases. L'ADN polymérase α est la principale enzyme de réplication chez les eucaryotes. Mais on connaît également des polymérases β et δ impliquées au niveau du site de réplication, ainsi qu'une polymérase γ à localisation mitochondriale.
L'intégrité de l'ADN
L'ADN est une matrice sur laquelle toutes les cellules prélèvent le plan de fabrication des différentes enzymes dont elles ont besoin pour fonctionner normalement. Il est donc indispensable pour leur survie que les informations contenue dans la double hélice soient fiables. Or de nombreuses substances ou événements sont susceptibles d'altérer sa structure. Généralement, ce phénomène est appelé mutation.
Pour pallier cet inconvénient, il existe normalement dans toute cellule des systèmes enzymatiques capables de détecter ces altérations et de les réparer. Leur principe est relativement simple. Le fragment anormal est excisé par des nucléases qui dégradent l'ADN, puis une ADN polymérase resynthétise le fragment correct. Enfin, une ligase assure la fixation covalente du brin néoformé.

 

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